Dans l’Aube, la forêt éponge, remède aux inondations et sécheresses

« Ces dernières années, dès qu’il y avait une pluie, même faible, les paysans retrouvaient leurs prairies inondées, en aval du bassin versant du Brévant. Et en amont, la forêt de Rumilly-Chaource dépérissait suite aux sécheresses à répétition », se rappelle Patrice Baillet, maire de Lasson et Président du Syndicat Mixte du Bassin Versant de l’Armançon (SMBVA). Le syndicat lance alors un diagnostic pour comprendre ces phénomènes.

Observer que tout est lié… au fil de l’eau 

Situé dans le département de l'Aube, le massif forestier du Brévant abrite des milieux humides riches en espèces végétales et animales et offre des retombées économiques aux communes qui l’exploitent pour son bois d’œuvre. Depuis les années 1960/70, l’intensification de cette activité a donné lieu à des aménagements pour faciliter le passage des engins. Le cours d’eau a vu son tracé modifié (suppression des méandres) et un réseau de fossés drainants s’est construit pour garantir des pistes forestières praticables en toutes saisons. Résultat : l’eau est drainée dès la moindre averse et la forêt ne joue plus son rôle « d’éponge », en stockant dans son sol une grande quantité d’eau pendant les mois de pluie. « Il était évident pour tout le monde qu’il fallait permettre à la forêt de retrouver son rôle naturel d’infiltration de l’eau » partage Patrice Baillet. Mais comment faire ?

Des solutions fondées sur la nature pour restaurer les services écosystémiques 

C’est en se basant sur l’étude de la cartographie ancienne, que le SMBVA a restauré les méandres naturels du Brévant. Les drains ont été supprimés à l’aide de bouchons au niveau des fossés. Et des redans (de petits obstacles perpendiculaires aux écoulements disposés dans les fossés) ont été installés le long des voies forestières pour retenir l’eau et éviter qu’elle ne s’écoule. Dix-huit ouvrages hydrauliques ont été réduits pour permettre au Brévant de déborder et de stocker davantage d’eau.

Une forêt en bonne santé pour un territoire plus résilient 

Ces travaux de restauration ont été accompagnés de deux années de concertation notamment avec les propriétaires et les gestionnaires de la forêt, qui ont tout de même dû accepter une baisse de rendement. « La phase de sensibilisation est décisive dans ce genre de projet » précise l’élu, « cela a permis d’intégrer la nécessaire modification du régime d’exploitation et donc des revenus associés ». Le faible nombre de propriétaires, principalement des institutionnels (communes, Caisse des Dépôts, etc.) a facilité la démarche.

Les travaux se sont terminés au printemps dernier. Ils devraient apporter des solutions durables en matière d’adaptation au changement climatique (régulation des inondations et de l’équilibre hydrique face aux canicules et aux pluies intenses) et permettre la restauration d’écosystèmes humides comme des ripisylves ou des mares qui accueilleront une riche faune et flore. Tout en permettant de continuer les activités d’exploitation forestière qui fournissent des revenus essentiels aux collectivités locales. Et Patrice Baillet de conclure, « il y a de nombreux co-bénéfices à prendre soin de nos forêts. D’autres projets de ce type sont d’ailleurs déjà à l’étude sur le massif forestier de Pontigny dans l’Yonne ». Le projet a d’ailleurs été récompensé par le programme Life Artisan.