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Inondation : à quoi s’attendre et comment s’adapter ?

Avec un habitant sur quatre concerné, le risque d’inondation est le plus généralisé en France. Le changement climatique, qui se traduit localement par une hausse des pluies violentes, accentue encore ce risque. Les collectivités ont la possibilité d'agir afin de prévenir ce risque ou d’en réduire les conséquences.

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Nombre de Français

exposés au risque d’inondation

1 sur 3

Nombre de communes

exposées au risque d’inondation

50

milliards d'euros

c’est le prix que devrait peser le risque Inondation sur l’assurance sur 2020-2050 : soit + 81% (France Assureurs, 2021)

Comprendre

De quoi parle-t-on ?

Le phénomène inondation recouvre plusieurs cas de figure distincts :

  • le débordement d’un cours d’eau, de façon lente ou rapide
  • le ruissellement : les eaux de pluies ne parviennent plus à s’infiltrer dans le sol et se déversent dans des zones habituellement sèches, en particulier les rues (le portail Géorisques éclaire ce phénomène dans un article dédié)
  • la remontée de nappes phréatiques jusqu’à la surface du sol
  • la submersion marine : inondations rapides et courtes (de quelques heures à quelques jours) des côtes par la mer lors de conditions météorologiques et océaniques défavorables (ce cas est traité dans notre dossier Submersion marine)

 

L’aménagement du territoire aggrave le risque d’inondation

Depuis des décennies, l’aménagement du territoire aggrave le risque d'inondation. Tout d’abord, parce que de nombreux réseaux d’infrastructures de transport, d’entreprises, d’habitations ont été construits en zone inondable. Par ailleurs, en ville, l’imperméabilisation des sols bloque l’absorption de l’eau et favorise son ruissellement sur le sol. La modification des espaces naturels accentue aussi le risque d’inondation. L’assèchement des zones humides, la disparition des haies et des bocages font que l’eau arrive plus vite dans les rivières, qui débordent plus violemment. La rectification artificielle du lit des rivières (suppression de ses méandres) accélère aussi l’écoulement des eaux.

 

Et le changement climatique ?

Contrairement à ce qu’on pourrait croire, le réchauffement climatique est aussi synonyme de pluies plus intenses et d’inondations plus marquées. Plus l’air est chaud, plus il contient de vapeur d’eau… qui se transformera potentiellement en averses intenses. Cette réalité se traduit déjà sur le terrain par une répartition des pluies plus inégale sur l’année, avec une alternance entre périodes de sécheresse (qui imperméabilise les sols) et épisodes de précipitations intenses que les sols ne parviennent plus à absorber.

Les projections climatiques sont sans appel. Selon le sixième rapport du GIEC, l'intensification des précipitations extrêmes devrait suivre une règle simple : +7% d'intensité pour chaque degré de réchauffement. Dans un scénario à +1,5°C, les précipitations décennales (ayant une chance sur dix d'advenir chaque année) se produiront 1,5 fois plus souvent. À +4°C, cette probabilité est multipliée par 2,7.

Il est urgent d’agir

Les inondations provoquent des dégâts humains et matériels considérables : décès, déplacements de populations, impacts sur la santé physique et psychique, dégradations de biens et des réseaux (électriques, télécommunications…), perturbations des services publics (transports, collecte et gestion des déchets, hôpitaux…). Il est nécessaire d’anticiper et de prévenir ce risque.

En France, c’est le premier risque naturel par l’importance des dommages qu’il provoque et des communes concernées (16 000 communes). Les récentes catastrophes montrent à quel point l’ensemble du territoire français est vulnérable, en ville ou à la campagne. Tous sinistres confondus (particuliers et professionnels), le risque inondation devrait peser 50 milliards d’euros sur la période 2020-2050 sur l’assurance, soit une hausse de 81% par rapport à la période passée (France Assureurs, 2021).

Agir

Face au risque d’inondation, les collectivités territoriales ont un rôle essentiel pour réduire la vulnérabilité de leurs territoires et protéger leur population. Au-delà des outils classiques d’aménagement et de prévention, de nouvelles solutions sont à explorer : développer les solutions fondées sur la nature ou renforcer la culture du risque en font partie

Une chaîne d’outils pour prévenir les inondations dans les zones à risque

Un arsenal documentaire pour évaluer les risques

Les collectivités disposent d'une boîte à outils fournie pour identifier les risques sur leur territoire. Le préfet met à disposition le dossier départemental des risques majeurs (DDRM), les atlas de zones inondables (AZI) et la cartographie des territoires à risque d'inondation important (TRI). Mais les élus peuvent aller plus loin. Des études complémentaires permettent de mieux connaître des aléas localisés comme le ruissellement ou les crues torrentielles, encore mal documentés dans les outils nationaux. Quelques sites à consulter :

- Géorisques répertorie tous les risques par localité, dont le risque d’inondation.
- Vigicrues alerte sur le risque de crue(s) dans les 24 heures à venir.
- Facili'TACCT propose des indicateurs par localités d'évolution des risques, dont les fortes précipitations.

Un cadre réglementaire structuré pour maîtriser l’urbanisme et gérer les risques

  • Le code de l’urbanisme impose désormais aux collectivités de prendre en compte l’adaptation au changement climatique et la prévention des risques dans l’urbanisme. Une chaîne de documents réglementaires permet de contraindre l'aménagement pour limiter l'exposition selon les échelles.
  • À l’échelle de la région : le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) tient compte du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) et du plan de gestion des risques inondations (PGRI), tout deux établis à l’échelle du bassin versant. Le PGRI fixe les grandes lignes stratégiques pour réduire les inondations de façon globale (prévision, alerte, urbanisme, résilience).
  • À l’échelle intercommunale : le Schéma de cohérence territoriale (SCoT) reprend ces orientations et peut interdire des implantations dans les zones exposées. Depuis 2018, les intercommunalités sont compétentes pour prévenir les inondations au titre de la Gemapi (Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations). Cette réforme concentre à l'échelle intercommunale des compétences auparavant morcelées.
  • À l’échelle de la commune : le plan de prévention des risques d’inondation (PPRI), cartographie les zones à risque et réglemente l’urbanisation. Élaboré par le préfet de département, en concertation avec la collectivité, il est annexé au plan local d’urbanisme et opposable au tiers. Des guides méthodologiques aident à sa mise en place.
  • À l’échelle du bassin de risque, les collectivités ou leurs groupements (EPCI, syndicat mixte…) sont incités à adopter un programme d'actions de prévention des inondations (PAPI). Ce programme opérationnel ouvre droit au financement du fonds de prévention des risques naturels majeurs (fonds Barnier), dans le cadre d’appels à projet de l’État. Il comprend un diagnostic territorial, une stratégie locale et sa déclinaison opérationnelle sur plusieurs années.
Le maire en première ligne

Le maire conserve des responsabilités cruciales :
- Informer préventivement les habitants sur les risques
- Intégrer ces risques dans les documents d'urbanisme
- Assurer la surveillance et l'alerte
- Organiser les secours en cas d'inondation
- Intervenir en cas de carence des propriétaires pour le libre écoulement des eaux

Attention, sa responsabilité pénale peut être engagée en cas de défaillance. Pour en savoir plus, voir le Mémento du maire.

Recourir aux solutions fondées sur la nature

Restaurer le tracé naturel des cours d'eau

Les cours d’eau ont souvent été artificialisés par des aménagements (endiguement, chenalisation…) pour faciliter la navigation et leur utilisation par l'industrie (nucléaire, barrages…) . L'eau circule donc plus vite, ce qui augmente le risque d'inondation par débordement et pour les territoires en aval. Face aux modifications paysagères et climatiques, ces rivières linéaires ne sont plus en capacité d'absorber un apport massif d'eau. 

L’idée ? Rendre à la rivière son hydromorphologie naturelle pour qu'elle retrouve son rôle de régulateur du cycle de l'eau par une série d’actions concrètes :
- Revégétaliser les berges pour diminuer la vitesse du courant (restaurer la ripisylve).
- Reméandrer la rivière (une rivière sinueuse aura un débit moins violent).
- Créer des zones d’expansion de crues. En période de hautes eaux ou de crues, l’eau peut s’épandre dans ses bras morts, forêts alluviales, prairies inondables… plutôt que dans des zones habitées. Cette expansion dans ces zones tampons limite la violence des inondations.

Souvent plus efficace que les digues, cette solution est moins coûteuse et présente aussi l’avantage d’offrir des habitats naturels pour la faune et la flore.

Pour freiner les inondations, ce bourg de la Loire reméandre sa rivère

Restauration du Bézo

Depuis plusieurs années, la ville de Charlieu, 3700 habitants, était régulièrement inondée à cause d'un petit cours d'eau, le Bezo. Cet affluent de la rivière avait été artificialisé pour drainer les pâturages. Résultat, en cas de pluies intenses, son débit trop rapide faisait déborder le Sornin. Pour stopper cette situation, la communauté de communes et la ville ont fait le choix de restaurer son tracé naturel sur 600 mètres et de recréer la digue.
Réalisé en 2024, le chantier a eu de multiples conséquences positives : champ d’expansion de crues de 2 hectares restauré, ralentissement des écoulements, amélioration de la qualité de l’eau, recharge de la nappe phréatique, où Charlieu puise son eau potable, zone naturelle sauvage regagnée pour la biodiversité, création d’un sentier. Ce projet de 1,65 millions d’euros a été financé à 80% par des subventions (Agence de l’eau, Etat, département, Fond européen Leader).

Préserver les zones humides pour stocker l’eau

En France, on estime que la moitié des zones humides (tourbières, mares…) a disparu entre les années 1960 et 1990. Pourtant, petits ou grands, en ville ou à la campagne, les milieux humides permettent d’infiltrer l’eau dans le sol de l’amont à l’aval et limitent l’impact des crues. Ils stockent l’eau en hiver et la restituent en été. Le Centre de ressources des milieux humides de l'Office Français de la Biodiversité recense les informations, les moyens et les financements possibles pour les protéger.

Bassée
La zone inondable de la Bassée accueille l'expansion de la Seine en cas de crue en amont de Paris. La remplacer par un barrage coûterait entre 100 et 300 millions d’euros. Source : OFB.

Rendre au sol son pouvoir d'absorption

Un sol débitumé trop sec ou trop compact peut difficilement retenir l'eau. On peut l’aider à retrouver son rôle d’éponge en augmentant sa teneur en matière organique ou en limitant son tassement par des engins lourds. On peut aussi améliorer son système racinaire pour l’aérer et le maintenir : planter des haies, des boisements, maintenir des prairies, tout cela  limite le risque de ruissellement, tout en offrant des corridors écologiques qui facilitent le déplacement des espèces sauvages.

Lire aussi : le sol, un trésor à protéger face au changement climatique

Ville éponge : repenser l'urbain 

Cette nouvelle approche d'une ville perméable gagne les collectivités.  En milieu urbain, l’imperméabilisation des sols augmente fortement le ruissellement des eaux sur le sol et saturent rapidement les systèmes d'évacuation classiques. Permettre à l’eau de pluie de s’infiltrer là où elle tombe évite de surcharger les réseaux et recharge les nappes tout en réduisant les rejets directs d’eaux de pluie des villes dans les rivières, source de pollution des milieux aquatiques. 

Les techniques à généraliser :  créer des parcs urbains, végétaliser les toitures, privilégier les revêtements perméables (écorces naturelles, pavés, dalles alvéolaires, gravillons…), désimperméabiliser les sols des cours d’école ou les parkings, déconnecter des gouttières pour renvoyer leurs eaux pluviales vers des jardins de pluies ou dans des noues d’infiltration… 

Retenir l'eau pendant les fortes pluies : l'exemple des bassins de Saint-Priest (69)

 

© Thierry Fournier - Métropole de Lyon

Depuis 1998, la Métropole de Lyon entretient un ensemble de bassins pour recueillir l'eau de pluie dans la zone industrielle Portes des Alpes à Saint-Priest. Trois lacs, reliés à deux bassins de rétention et à un fossé d'infiltration fonctionnent en vases communicants pour collecter l'eau, la stocker temporairement et la laisser décanter, avant de l'évacuer. Cette solution allie biodiversité, prévention des inondations, dépollution, préservation des paysages… Son coût d'1,5 million d'euros reste trois fois moins élevé qu'une solution « tout tuyau ».

Sensibiliser les populations

Habitants, entreprises, associations, institutions… tout le monde est concerné par le risque inondation. Développer une culture du risque au niveau local, partager un diagnostic du territoire, faire prendre conscience à chacun des risques encourus est essentiel. Une population informée avec les bons réflexes est une population moins exposée.

Plus on acculture au risque tôt, plus il devient une habitude. De plus en plus de collectivités engagent des actions d’animation et de sensibilisation auprès des plus jeunes, ou installent des marqueurs de crue pour rappeler cet enjeu dans l'espace au quotidien.

Télécharger : le kit communication inondation

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Auteur
Centre Européen de Prévention du Risque d'Inondation (CEPRI)
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